vendredi 31 mai 2013

Ma fête des Nations-Unies


Cette semaine c’était ma fête et j’ai eu 9 ans!

Nous avons invité des amis à la maison pour célébrer mon anniversaire. Au Burkina Faso, étant donné que les gens font la sieste l’après-midi, les fêtes d’anniversaires commencent vers 15 :00. Ceci nous a donné le temps de préparer les « petits cochons » version Burkinabé, ainsi que les fameuses pizza à Balkissa. Papa nous a préparé une chasse aux trésors, et un jeu d’adresse avec le ballon de foot.

J’aimerais vous présenter les amis qui sont venus fêter avec moi à la maison et qui sont tous dans ma classe de CE2 à l’école française André Malraux!

Luka 

Luka est mon meilleur ami.  Il est métis, son papa est Burkinabé et sa mère Hollandaise.  Il a une grande sœur (Johana) qui a 11 ans.  Il parle le français, comprend le Dioula et parle aussi Hollandais avec sa mère et sa sœur. C’est un passionné du foot et l’un des meilleurs joueurs de la classe.  Il a un chandail de l’équipe nationale, les Étalons, avec le numéro et le nom de son joueur préféré : Bance! Il est très gentil et habite dans un quartier populaire avec plein de familles burkinabées dans le voisinage. Je passe un après-midi par semaine chez lui et il vient à la maison aussi chaque semaine. On regarde souvent des films chez lui et chez moi on joue dans la piscine et aux Playmobiles.  On aime aussi lire des livres ensemble. Son repas favori est la pizza!

Théo 

Le grand-papa de Théo est français, mais sa grand-mère et sa mère sont Burkinabées.  Au foot il joue très bien à la défense.  Il est un peu gaffeur et fait souvent tomber sa chaise en classe.  Il est assis complètement à l’avant, devant Luka.  Il habite une grande maison avec une piscine. Son papa est très gentil et il conduit une petite auto rigolote qui ressemble à une grosse boîte de sardines!

 Djibril 

Djibril aime aussi beaucoup le foot.  Il est le 2e buteur de la classe, après Luka. Il est très grand, pourtant il n’a que 9 ans.  Il est Suisse, Français et Burkinabé. Il est très gentil, ricaneur et blagueur! Des fois, au foot, il fait à semblant de manquer son coup pour nous faire rire.


Tilouann 

Tilouann est arrivé au Burkina presqu’en même temps que moi et habite le même quartier appelé « Koko ». Il est ici  pour 6 mois avec sa famille qui vient de la Bretagne.  Il a une sœur qui s’appelle Awa et qui a 5 ans.  Il n’aime pas trop le foot, mais les mardi et vendredi on partage un cours de Judo.  On fait souvent des sorties avec sa famille, comme à Banfora (Voir 24h top chrono à Banfora!), à la Guinguette (voir Jii) ou lors des cafés concerts au Centre Culturel Français, qui est juste devant notre école.

Ibrich

Hollandaise, elle est la seule fille blanche de ma classe.  Elle a encore un peu de difficulté à parler français, mais elle est très bonne à l’école et très sage en classe.  Elle aime la course et c’est la meilleure à la nage. Elle a deux petites sœurs plus jeunes qu’elle.  Elle a tellement aimé ma fête que cette semaine, elle viendra jouer à la maison en même temps que Luka!


Hanipha 

Burkinabé, il aime jouer au foot et au jeu de la « capture ». Il est très intelligent et ses matières favories sont le français et l’histoire. Son « comportement » est toujours dans le bleu et il est rapide pour compléter ses travaux de classe. Il a une grande sœur en CM2 (5e année) qui est très gentille aussi.

C’est avec tous ces amis que j’ai soufflé mes 9 bougies sur le gâteau au chocolat que Balkissa avait cuisiné.

Oh! J’ai presque oublié! Deux amis importants qui étaient à ma fête, mon petit frère Justin et mon « moyen » frère et grand ami de toujours Dominic, le ricaneur, Québécois pure laine, qui adore le foot et avec qui je partage ma chambre!

Merci pour la belle fête et vos cadeaux!!!

Jérémie


vendredi 17 mai 2013

Magiques et Mystérieux, les Masques du Burkina


Quand on aborde un sujet comme les masques, il faut une première mise en garde. Quel que soit le récit qui va suivre, sachez qu’il est fondé sur beaucoup de mystères, de nombreux secrets, une panoplie de non-dits et surtout une grande dose d’incompréhension due à nos esprits occidentaux! Comme l’exprime Balkissa : « C’est difficile d’expliquer en mots ce que signifient les masques. »
Mais voici tout de même, pour camper le sujet, une citation des frères Assane & Ousseni Ouattara, artistes spécialisés dans la confection de masques :
« En Afrique, les masques « sortent » lors de cérémonies importantes : cultes des ancêtres, des morts, rites d’initiation ou fêtes communautaires. Créations éphémères en feuilles, sculptures de bois ou de métal, ils permettent de communiquer avec les défunts ou avec des esprits. Ils masquent au sens propre comme au figuré celui qui les porte, afin de l’aider à personnifier une force errante, esprit ou dieu. »

Dioulassoba
La région de Bobo-Dioulasso est particulièrement reconnue pour ses célébrations des masques. Notre première expérience est lors de la visite de l’ancien quartier : Dioulassoba. Notre guide, Boubakar nous explique que les masques sortent à de rares occasions pour célébrer la mort d’une personne très âgée de la communauté.
Il nous prévient que ces masques déambulent dans les rues avec des fouets, et frappent les descendants de la personne défunte! Quelle surprise quand on aperçoit ces êtres recouverts de fibres vertes! Une représentation typique de création éphémère. Lorsque l’on dit « masques », il faut comprendre un costume complet qui couvre de la tête aux pieds et rend complètement anonyme celui qui le porte! Les masques qui rôdent dans le vieux quartier passent au côté d’une jeune femme qui porte le portrait du défunt, elle reçoit de généreux coups de fouet sur sa jupe, qui est composée de 4 ou 5 épaisseurs de tissu et autres doublures!
Kuinima
Avril et mai sont les mois des célébrations annuelles des masques : forme de funérailles collectives, hommage aux défunts, aux ancêtres et, bien entendu, fête populaire! Balkissa nous invite dans son quartier pour les masques. L’effervescence est palpable dès notre arrivée; tout le quartier semble se retrouver dans la rue!


Les premiers masques rencontrés sont parés de fibres rouge vif, mauve, orangé et coiffés de large sculpture en bois finement taillé. Les groupes formés de 4-5 masques sont suivis par des dizaines de personnes, voire une centaine. Ici et là ils s’arrêtent quelques minutes pour danser devant une concession où les habitants ont sorti nattes et chaises pour assister au « spectacle » de la rue!
Une procession solennelle composée seulement d’hommes passe devant nous. « Ce sont des griots qui président les funérailles » nous précise Balkissa. « Retournons à la maison, mon fils doit arriver avec son groupe qui anime la fête ». Abdoul arrive en sautant avec ses amis; il porte une hache traditionnelle à la main. Un masque les suit, s’assoit sur le chef de famille qui lui tend quelques pièces de Francs CFA et la troupe repart frénétiquement. Toute la journée jusqu’en soirée et ce, pendant 3 jours, les masques amèneront de la vie dans les rues du quartier Kuinima, tout en célébrant les morts!
Koumi

Quelques semaines plus tard, nous sommes en route vers Koumi, un village traditionnel près de Bobo. « Il doit y avoir une fête au village, il y a trop de monde sur la route » annonce Aruna, notre guide. Sérafin, son oncle, nous confirme qu’il y aura des masques aujourd’hui!
Vers midi, nous nous retrouvons sur la place centrale du village où un grand cercle est tracé de poudre blanche. Notre banc a beau être accolé au cercle, quand les masque arrivent il y a au moins 5 rangées de personnes assises devant nous!
« Chaque masque représente des défunts des différents quartiers du village, divisé entre les nobles, les agriculteurs, les forgerons et les griots. » Les griots, ou les gardiens des traditions, sont également responsables de la musique, afin de communiquer « avec les différentes dimensions du monde » soit : les vivants, les ancêtres et les esprits. Celui qui s’exprime au tambour est particulièrement charismatique. Il approche un-à-un les masques assis autour du cercle, il les amène à danser au centre et, de temps en temps, des jeunes viennent sauter et réaliser jusqu'à des saltos, au grand bonheur de la foule.
Foule qui se fait nombreuse et insistante pour voir les prestations! À un certain moment, une vague humaine déferle sur notre section et les bancs sont renversés! Un masque est arrivé avec son fouet et s’est mis à menacer les spectateurs en frappant le sol! Après le tumulte, Jérémie et moi nous frayons un chemin à l’avant-scène. Jérémie sera pris dans les bras d’un ami à quatre reprises pour éviter un mouvement trop brusque de la foule…Ça frise la folie… Mais nous sommes au cœur de l’action!
Les derniers masques, qui arborent des cornes de bélier, font leur entrée. « Ils représentent la brousse, ce sont les plus importants; sans les agriculteurs, les autres quartiers ne peuvent exister.» annonce fièrement Sérafin.
Sindou

C’est à Sindou que j’assiste aux masques de nuit pour la première fois. Notre guide, Sinali vient me chercher à 1h du matin. « Cette nuit précède les célébrations du 7e jour du décès d’une aînée » m’explique-t-il en route vers un espace en bordure du village. Quelques centaines de personnes sont présentes. Certains sont au centre pour danser en ronde derrière les musiciens. On brûle des gerbes de paille pour éclairer le passage des masques qui entrent et ressortent à tour de rôle. « Ce sont surtout des masques de chats, qui peuvent chasser la nuit. Ils chassent les mauvais esprits pour que demain on puisse célébrer la défunte sans réserve », précise Sinali avant d’ajouter avec un sourire : « Ici tu ne meurs pas, tu voyages. »
À 2h, il me dépose au camp et alors que je me glisse dans le lit sans réveiller les enfants, je peux encore entendre la rumeur des tambours et des chants qui sont pourtant à plus d’un kilomètre.
Je reviens aux mots des frères Ouattara : « Chaque masque est comme un livre ouvert qui fascine d’abord par sa couverture étrange. Poussés par la curiosité, on l’ouvre, on le décrypte, pour finalement se laisser envoûter au fil des pages. »
Éric et Sophie